En direct des laboratoires du CNRS, membre de la Plateforme Océan et Climat

Les nouvelles projections climatiques sur les récifs coralliens de notre planète montrent les récifs qui seront affectés par un blanchissement annuel, un stress qui est considéré comme le plus dramatique pour la survie même des récifs. Ces projections hautes-résolutions, basées sur les nouveaux modèles climatiques, prédisent où et quand on peut attendre des blanchissements coralliens. Ces prédictions montrent ainsi que les récifs de Taiwan et ceux autours des archipels de Turks et Cocos seront les premier à sibir des blanchissements annuels récurrents. D’autres récifs, tels que ceux des côtes de Bahrain, du Chili ou de Polynésie, seront affectés par des blanchissements annuels récurrents plusieurs dizaines d’années plus tard si l’on se fie aux travaux publiés récemment dans Nature Scientific Reports. 

© Erwan AMICE/IRD/CNRS Photothèque

Les récifs coralliens sont parmi les écosystèmes les plus vulnérables aux changements climatiques est la vulnérabilité des récifs face aux évènements futurs de blanchissement varie dans le monde. Cette vulnérabilité est directement fonction de l’exposition à l’augmentation de la température des océans qui cause le blanchissement et entraîne des mortalités dans les récifs coralliens. Le but de l’étude était d’utiliser des modèles de prédictions du changement climatique afin d’évaluer comment l’exposition future à l’augmentation de la température des océans variera selon les récifs du monde entier et en fonction de la localisation.


Le CNRS a produit des modèles de projections climatiques à une résolution fine de 4 km qui montrent que tous les récifs coralliens connaîtront des épisodes de blanchissement sévère au cours de ce siècle. La répétition des blanchissements années après années entrainera des mortalités et des récifs coralliens où les coraux deviendront rares et seront dominés par les macro-algues. Il faut alors savoir que les récifs couverts d’algues fournissent moins d’usages et de services aux civilisations – ils abritent moins de biodiversité et représentent un habitat de qualité inférieure pour les récifs et les poissons coralliens.

Les modèles climatiques ont permis de prédire les évènements de blanchissement annuels jusqu’en 2043. On observe qu’il existe de grandes variations spatiales dans les projections des blanchissements annuels avec les modèles climatiques actuels Les récifs qui subissent le moins de blanchissement et donc de stress représentent des priorités pour la conservation. Ces « refuges » sont les régions susceptibles de fournir des biens et des services sur plusieurs décennies. La Polynésie française, en particulier les régions méridionales où sont situées les îles de Tahiti et de Moorea, feront partie des « refuges climatiques » et doivent être protégées en priorités.

Le futur des récifs coralliens a été examiné également pour voir comment ils pourraient changer en prenant en compte l’Accord de Paris récemment ratifié sur le climat. Dans le cadre de l’Accord de Paris, la plupart des pays du monde entier ont pris des engagements pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans le contexte de ces réductions, il n’en demeure pas moins que la plupart des récifs coralliens continueront de devoir faire face à des blanchissements sévères au cours de ce siècle même si les promesses de réduction des émissions deviennent une réalité. Cependant, ces réductions d’émissions prévues offrent un temps de répit supplémentaire avant que les températures des océans ne soient trop importantes pour causer un blanchissement sévère des coraux. La Polynésie française reste l’un des sites, avec les îles du nord-ouest d’Hawaï, qui seront les bénéficiaires des engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. En effet, de nombreux récifs dans le sud de la Polynésie française, tels que Tahiti et les îles Moorea, ne seraient alors pas impactés par un blanchissement annuel récurrent. Dans ce contexte, la Polynésie française représente un refuge climatique mondial pour les récifs coralliens et pourrait être parmi l’un des rares récifs coralliens qui maintienne sa structure actuelle d’ici à la fin de ce siècle.

« Ces prédictions représentent un élément essentiels pour tous ceux qui se focalisent et se battent pour la protection des récifs coralliens et contre les conséquences dramatiques du changement climatique sur les récifs coralliens » , dit ainsi Erik Solheim, directeur de UN Environment. 

« Ces prédictions permettent à présent aux gouvernements de mettre en place des priorités en termes de protections des récifs coralliens qui donneront un peu plus de temps aux récifs pour s’acclimater au réchauffement des océans. Ces projections nous montrent où nous avons un peu de temps avec qu’il ne soit trop tard » .

Les projections élaborées sont disponibles sous forme d’outils cartographiques interactifs sur les sites Web du PNUE et du NOAA Coral Reef Watch. Ce projet a constitué une collaboration entre le PNUE, le WWF, le NOAA-PIFSC, l’USGS-PICSC, l’US-NFWF, l’ERC et l’EPHE-CNRS et CRIOBE.

Par Jeffery Maynard et Serge Planes, Centre de recherche insulaire et observatoire de l’environnement (CRIOBE)